mardi 24 janvier 2012

4e étape

bien étrange pays, décidément.
tout le monde se claque la bise (une seule), les costards-cravate comme les copines.
on trouve dans les magasins assez peu de variétés de produits (bon, c'est pas la roumanie en 1987 non plus), souvent d'une seule marque (un mur de tubes de dentifrice colgate ou un rayon inondé de produits laitiers conaprole - et pas un seul yahourt nature sans sucre).
fruits et légumes généralement importés et aussi chers et dégueu qu'à carrefour (pas encore trouvé d'amap ! ouarf)
les ingrédients exotiques, on oublie (curry, saté...), les fromages au lait cru, on oublie (mais comme partout), les charcuteries, on oublie (c'est la médecine du travail qui est contente), les sacs à glaçons on oublie (pénible pour faire les daïquiris), le sirop de sucre de canne, on oublie (pénible pour faire les ti-punch).
en revanche, la bière est vendue en bouteille de verre de 1 litre consignée.
il y a du gin beefeater et bombay saphire en grande surface (les gin tonic dosés spécial rugbyman hémisphère sud sont à 4 euros au bar) et ils font du vin pas dégueulasse (cépage tannat, comme dans le madiran).
les citrons sont verts (pratique pour les caïpirinhas).
et la viande rouge coûte que dalle (mais ils ne connaissent pas la côte de boeuf et comme toutes les découpes sont différentes de par chez nous, je nage encore un peu dans l'offre pléthorique).


lundi 2 janvier 2012

macché priorité à droite ?

bon, c'est bien joli, les voyages, les motos, tout ça.
mais j'ai aussi une vie, bordel !
aujourd'hui, donc, montevideo, ma vie, mon oeuvre, mon cul (1).

résumé des épisodes précédents:
après un an au bureau de l'afp à lyon (et après de nombreuses candidatures infructueuses au bureau régional de montevideo - capitale méconnue d'un pays méconnu, coincé entre l'argentine, le brésil et l'océan atlantique, l'uruguay, qui a eu l'heure des gros titres de la presse français il y a une quinzaine d'années lorsque vint s'y planquer l'ancien maire de corrompu de nice jacques médecin), je suis finalement parvenu à me faire nommer sur l'un des deux derniers postes de journalistes francophones que cette grande et glorieuse agence de presse internationale maintient en amérique latine (le second poste étant situé à ma droite, à environ 1m20).

à la maison:
fin septembre, me voilà donc installé dans un trois-pièces de 60/70 de m2 plus terrasse, orienté nord (soleil, donc), au 10e et dernier étage (on appelle ça un "pentrouse", ici (avé l'accent)) d'un immeuble des années 70 du quartier de pocitos (aisé sans etre chic), à trois quadras de la rambla, avec vue dégagée sur la ville et la mer (à droite).
j'arrive en début de printemps, mais il fait un temps dégueulasse.
vent (polaire, le vent, et plus tu es haut et près de la mer, plus il te dégage les écoutilles), pluie, grisaille (j'apprendrai au fil des semaines que la météo ici est souvent exécrable).
la météo est pourrie mais les appart sont conçus comme si on était à rio: pas isolés, simple vitrage sur châssis alu branlants (je me demandais pourquoi il y avait des bouts de cartons pliés dans toutes les fenêtres. j'ai compris: c'est pour les empêcher de faire du raffut quand souffle le vent de la pampa antarctique), rarement du chauffage ou alors électrique (et le kWh est deux fois plus cher qu'en france - je me prends à regretter le nucléaire).
en cherchant bien, je suis toutefois parvenu à trouver un logement équipé d'un chauffage central au gaz (reste à savoir si la chaudière ne va pas me péter à la gueule aux premiers frimas) mais l'eau chaude reste électrique (petit ballon de 30 litres, on apprend la sobriété).
quelques petits soucis avec la proprio (sale race, les proprios, sous toutes les latitudes - excepté quelques rares honnêtes gens - si vous voyez ce que je veux dire...), mais les choses se sont mises en place et me voici donc à peu près installé, avec exactement les mêmes meubles et la même déco qu'en france: rigolo.
au quotidien, une fois que tu es habitué à l'absence de va-et-vient, à l'impossibilté de trouver des ampoules à baïonnette, aux ascenseurs pour résidents et aux ascenseurs de service ainsi qu'à l'odeur de gaz dans l'air (ça fuit de partout), tout roule.

au travail:
fini les joies des horaires décalés, pour la première fois depuis le début de ma vie professionnelle, j'ai (généralement) des horaires de bureau, type 10h00/18h00.
deux francophones immergés dans une rédaction d'hispano (beaucoup d'espagnols, qui parlent bien mieux le français que nous l'espingouin), dont la tache principale est de traduire en français ce qui est susceptible d'intéresser les clients francophones de l'afp.
en clair: huit heures par jour le cul sur une chaise derrière mon écran.
mais au moins, fini les joggueuses-dépecées-dans-les-
sous-bois qui font peur à la france, les petites phrases de politiques en campagne, les synthèses-bouchons-sur-l'autoroute-du-soleil, les alertes-météo-sur-12-départements-du-sud-ouest et les copier-coller de communiqués de la préfecture ou du parquet.
ça fait des vacances et ne viens plus au travail à reculons.
d'autant que les chefs ici étant hispano et les chefs de chefs à paris se tamponnant généreusement le coquillard de ce qui se passe dans la région, on nous fout une paix royale et on traite ce qu'on veut.
un peu comme si j'étais payé pour lire wikipédia toute la journée.
y'a plus dégueu.

l'équipe en général comprend une cinquantaine de personnes, tous hispano sauf 7 français (cinq chefs et nous) et supervise la production du mexique à la terre de feu.
une certaine solidarité lie assez rapidement les exilés de toute sorte (expatriés, locaux, régionaux, cdd, cdi...) et tout se passe dans une franche camaraderie (sur le plan humain. sur le plan professionnel, j'ai envie de les étrangler trois fois par jour tellement ils sont pas rigoureux).
buveurs avides de maté (la rédaction, comme les rues, les bus, les supermachés...) est envahie de thermos et de petites tasses (mate) remplies d'herbe (yerba) desquelles émerge une paille métallique (bombilla), il leur manque toutefois la tradition de l'apéro-boulot du vendredi soir.
mais je me sens une âme de missionnaire...

dans la vie:
vie sociale forcément limitée (si j'avais peu d'amis à lyon, je n'en ai carrément pas ici), mais comme on est nombreux dans le même cas, on se serre les coudes et on sort pas mal entre collègues du vieux continent.
l'inconvénient, c'est qu'ils parlent tous bien français.
rencontrer des locaux, c'est pas évident.
d'abord parce que travaillant dans un bureau et ne jouant pas au foot, j'ai peu l'occasion d'en croiser, ensuite parce qu'ils ne sont pas d'une expansivité (?) délirante, les indigènes...
courtois mais pas saute-au-paf.
et comme moi non plus...

dans la ville:
la ville de montevideo se caractérise par une architecture assez dégueu - efficace, disons, et quasiment aucun vestiges coloniaux - et un centre-ville assez peu fréquenté le soir, hormis quelques bars et boites.
les lieux de sorties sont très dispersés, ce qui contraint à prendre des taxis ou rouler bourré à moto, et de ce fait quasiment impossibles à découvrir si on n'est pas guidé.
pour nous autres européens, ça manque clairement d'un quartier genre "ici on boit, on mange, on danse".
autre spécialité locale: les bars se remplissent à partir de 02h00 du matin.
avant, la ville est déserte.
c'est pas non plus que ça grouille après, ne nous affolons pas...
parce que oui, même si c'est une capitale de 1,5 millions d'habitants, on se demande souvent où ils sont.
c'est calme.
c'est très calme.
mais c'est aussi une ville où je n'ai pas vu une seule grosse bagnole genre porsche cayenne, où les riches ne sont pas (tous) barricadés derrière des murs hérissés de barbelés électrifiés et où on peut se balader la nuit sans crainte.
pas non plus de rue dédiée aux boutiques de luxe (juste quelques échoppes dans les shopping - centres commerciaux dont ils raffolent, imités des modèles américains) - pour ça, il faut aller à punta del este, et des supermachés très mal achalandés.
consommateurs compulsifs, z'êtes gourrés de trottoir !
pourtant, c'est relativement riche, en tout cas cher (et là, pas relativement).
la preuve qu'ils sont riches ?
ils ont des chiens.
des tas de chiens !
et les gars qui font les poubelles ont des carrioles tirées par des chevaux (au brésil, ils les tiraient à la main).
bourgeois !
c'est enfin une ville du bout du monde, qui ne figure sur aucune carte aérienne ou presque, et de laquelle il est très difficile - et très cher - de sortir une fois que vous êtes tombés dedans.
en gros, c'est une ville dont on adore se plaindre, mais qui a un charme certain quand les beaux jours arrivent (enfin).
si seulement ils pouvaient avoir l'idée d'ouvrir des bars sur la plage !

voilà.
plus de détails dans une prochaine livraison, mais ça fera pour un premier aperçu, nan ?
allez, meilleurs voeux et bises à tous !
hugo

ps: semblerait que certains serveurs me virent direct en spam (yahoo notamment, mais pas que: si vous avez un utilisateur de ces adresses sous la main, dites z'y donc !)

(1) ma vie, mon oeuvre, mon cul, siné, aux éditions casterman